La poésie de Han Kang est un alcool fort, un alcool brut d’alambic que l’on goûte et déguste directement à la sortie du serpentin.
C’est pour moi une grande leçon de modestie lorsque je me confronte au talent de cette poétesse.
Dans ma bibliothèque, je rangerai ce recueil sur la planche dite «paradis» aux côtés de Jacques Bens, René Daumal ou encore Jacques Roubaud.
***
Chanson de convalescence
À présent
Qu'est-ce donc que vivre
Je restais couchée avec cette question
Lorsqu'un rayon de soleil s'est posé
Sur mon visage
Jusqu'au moment où la lumière s'en est allée
Je suis restée les yeux fermés
Le cœur apaisé
***
Esquisse du soir 3
- La vitre
Un soir sans rien de rouge
Dans la cour de la maison voisine
Flotte, suspendu à la corde à linge attachée
à un arbre,
Le manteau bleu marine d'un uniforme d'écolière
(Les soirs comme celui-ci
Mon cœur dort dans un tiroir)
Surface glacée de la vitre
Gardienne du silence
Moi, si prompte à ouvrir la bouche
J'apprends à me taire à jamais
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(Texte de la quatrième de couverture)
« Mes yeux sont deux restes de bougie dont la mèche brûle en faisant fondre de grosses gouttes de cire. Ce n'est ni chaud ni douloureux. Si la mèche bleuâtre oscille, c'est parce que les âmes vont et viennent. C'est parce que les âmes sont assises devant mes yeux. »
Après l'immense enthousiasme suscité par la publication de ses romans, nous découvrons avec Ces soirs rangés dans mon tiroir l'œuvre poétique de Han Kang, lauréate du prix Nobel de littérature. Dans ce premier recueil traduit en français, elle nous dévoile toute la beauté de sa plume. Elle y évoque la couleur des fins de journée, le froid, l'absence. Le corps aussi, tantôt affaibli, tantôt vigilant face au miroir. La lune est étrange, la mémoire des morts s'empare des maisons. Jusqu'à ce que la lumière revienne, que les femmes et les hommes quittent enfin l'obscurité.
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